Algérie: remaniement important des représentations diplomatiques

Parlement algérien
Parlement algérien

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, vient de procéder à la nomination par décret présidentiel de sept personnalités à des postes de premier plan, chargées des questions internationales les plus urgentes.

Ainsi, c'est à présent Monsieur Boudjemaa Delmy qui devient le nouveau responsable des questions africaines, notamment des questions géostratégiques.

Par ailleurs, tous les ambassadeurs et représentants diplomatiques ont été relevés de leurs fonctions. 70 postes de Chefs diplomatiques et consulaires sont concernés. La volonté du Président de la République est de placer des personnes avec plus d'expertise puisque nombre d'entre eux sont des cadres hautement expérimentés, mais aussi de mettre à ces postes importants de nombreux jeunes diplomates, prêts à dépenser leur énergie et à user de leur vigueur en faveur de la défense des intérêts de l'Algérie. Il est également prévu, lors de ce remaniement de personnel diplomatique, d'accorder une grande importance au rôle des femmes et d'améliorer leur représentation dans des postes de direction prestigieux.

L'Algérie est engagée dans de nombreuses médiations internationales et souhaite continuer à s'afficher en médiateur productif. L'Algérie ambitionne d'être une voix à l'international! Une voix de la raison, une source de paix, de stabilité et de sécurité.

La polémique autour de Belani

Toutes ces nominations n'ont pas fait l'objet de remarques ou de critiques particulières sauf la nomination d’Amar Belani comme représentant diplomatique. M. Belani a été critiqué autant par des médias algériens que des médias internationaux. M. Belani affiche bien trop ses positions contre le Maroc, pour un diplomate qui doit user de tact et s'exprimer posément, avec des propos raisonnables. Or il a été reproché à M. Belani d'être virulent à l'égard du Maroc et de vouloir "trop" défendre le Front Polisario.

Et c'est justement ces questions que M. Belani va être en charge de résoudre. Rappelons que son précédent poste concernait la représentation de l'Algérie auprès de l'Union Européenne et de l'OTAN, à ce poste, personne ne lui reprochait quoi que ce soit. La présidence a tenu à rappeler, dans un but d'apaisement face à la polémique, que de M. Belani sera tenu, comme tous les autres diplomates par ailleurs, de suivre les orientations imposées par la présidence.

Tebboune accroit son pouvoir d'action

Depuis l'indépendance de l'Algérie, l'armée algérienne est très impliquée dans la gestion du pays. De nombreux dirigeants politiques étaient liés ou font partie de l'armée qui a concentré tous les pouvoirs.

Toutefois le renouvellement orchestré par Tebboune est vu par de nombreux spécialistes comme une stratégie visant à éloigner l'armée des prises de décisions et permettre à la présidence et au gouvernement de reprendre leurs prérogatives dans le cadre d'une république démocratique.

Alors que l'Algérie traverse une crise diplomatique avec le Maroc, il est certain qu'un changement aussi important de diplomates n'est pas anodin et cache certainement bien d'autres explications.

Le président Abdelmadjid Tebboune a également renforcé le Comité de prévention et de gestion des crises. Il s'agit d'un organe chargé d'identifier et de traiter les menaces pouvant affecter l'Algérie. Ce comité sera indépendant de la défense nationale, l'armée donc, mais il est prévu qu'ils coopèrent ensemble.

Lamamra
Lamamra

Réconciliation entre le Maroc et l'Algérie

L'Arabie saoudite a proposé une médiation pour réconcilier l'Algérie et le Maroc. Le nouveau responsable de la question marocaine en Algérie, M. Ammar Belani, a indiqué qu'"il n'y aura pas de médiation sur cette question". La présidence algérienne va donc se passer de l'aide saoudienne et va probablement suivre une autre orientation; orientation que le ministre Ramtane Lamamra devrait dévoiler bientôt.

Côté marocain, les responsables politiques et diplomates qui sont responsables de cette tension diplomatique semblent silencieux. Un contraste saisissant avec les appels à la réconciliation, issus de la société civile au Maroc, qui sont nombreux et font grand bruit; comme la déclaration récente de plus de 240 intellectuels et militants pour le non-effondrement des relations diplomatiques et la nécessité d'une réconciliation entre l'Algérie et le Maroc.

Relations historiques algéro-marocaines

Le romancier et penseur marocain Hassan Aourid était également l'ancien porte-parole du Palais royal du Maroc. Il a évoqué récemment l'étendue des relations historiques profondes entre les deux peuples et entre les deux Etats: "Celui qui a conçu le drapeau marocain, était un Algérien du nom de Kaddour Benghabrit, la même personne qui a formé le protocole du régime du makhzen", avant d'ajouter "Le premier président de l'Algérie indépendante, feu Ahmed Ben Bella, était d'origine marocaine, en particulier de la périphérie de Marrakech, et sa famille est partie de Marrakech à la ville algérienne de Maghnia".

C'est certain que l'Algérie et le Maroc ont des imbrications dans leur histoire. De nombreuses personnalités en attestent comme, par exemple, Mehdi Ben Barka, qui fut le professeur d'Hassan II, et a étudié à l'Université d'Alger. Ou encore le président Ben Bella, qui s'était entouré de conseillers, dont les Marocains Mohamed Taheri Al-Jouti et Salam Jebali.

Celui qui a inspiré la célébration de la fête du Trône était un Algérien résidant à Salé et le premier secrétaire du roi Mohammed V était le juriste Si Maamari (Mohamed Maamari), né dans la région algérienne de Kabylie. Il fut le premier chef de l'autorité royale des protocoles et cérémonies, et le guide des princes dans le palais royal. De nombreuses personnalités algériennes ont vécu au Maroc avant l'indépendance de leur pays, comme Houari Boumediene, Abdelaziz Bouteflika, Larbi Belkheir, Kasdi Merbah, Yazid Zerhouni, Abdellatif Rahal, Sherif Belkacem, Chakib Khalil et d'autres.

Si de nombreuses personnalités ne suffisent pas, à elles seules, à attester de la puissance du lien entre deux pays, il faut aussi rappeler le soutien du Maroc à l'égard de l'Algérie pendant la période de la lutte contre le colonialisme français. L'armement de l'Armée de libération algérienne a été faite avec la complicité du sultan Mohammed V et du prince héritier Hassan II.

Et c'est d'ailleurs parce que le Maroc et l'Algérie ont un passé commun important, parce qu'ils sont voisins et proches depuis toujours, que les récentes trahisons des dirigeants et diplomates marocains sont inexcusables, inacceptables pour les Algériens. Rappeler que les deux pays ont un passé commun ne signifie pas qu'ils ont un avenir ensemble. Les militants acharnés marocains qui parlent au nom du peuple marocain en rabâchant à qui veut l'entendre que soutenir Israël est une bonne chose sont une des sources du problème abyssal entre les deux pays. Tout comme la propagande visant à culpabiliser l’Algérie de soutenir le Front Polisario, alors que c'est ce dernier qui a demandé l'aide de l'Algérie, et non l'Algérie qui se sert de ce conflit pour nuire au Maroc. Ce conflit ne rapporte rien à l'Algérie, si ce n'est des ennuis mais l'Algérie a des principes et n'en déroge pas.

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Mis en ligne : Jeudi 16 Septembre 2021
 
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