Une jeune femme voilée participe à un débat sur la laïcité en France

Sara el Attar
Sara el Attar

Sara El Attar était l'invitée de Pascal Praud dans son émission l'heure des Pros, ce lundi 21 octobre 2019, pour évoquer le débat sur la laïcité et le port du voile dans l'espace public.

Depuis l'affaire Julien Odoul, cet élu du Rassemblement National qui avait interpellé une mère de famille voilée, accompagnante lors d'une sortie scolaire au sein du Conseil régional de Bourgogne Franche-Comté, on ne cesse de relancer le débat national et médiatique sur le port du voile, dans les sorties scolaires d'une part, et plus généralement dans l'espace public.

Pascal Praud invite Sara El Attar

Pour lancer ce débat, l'émission de CNews "l'heure des pros" présentée par Pascal Praud, a réuni ce lundi matin plusieurs experts et journalistes autour de la table, ainsi que (quasiment pour la première fois sur un plateau télévisé) une citoyenne française qui porte le voile, Sara El Attar, consultante en gestion de projet, venue pour défendre ses convictions autour de la laïcité.Il n'en fallait pas plus pour susciter les questions parfois méfiantes et pour le moins orientées des chroniqueurs, à l'image de Pascal Praud et Elizabeth Levy, qui interrogent tour à tour les motivations de la jeune femme : "Pourquoi portez-vous le voile ?" ; "Le voile n'est pas mentionné dans le Coran, il n'existe pas!"

Un cheminement personnel sans aucune soumission

Sara El Attar tente alors de répondre en évoquant sa propre histoire. "Le voile que je porte c'est le fruit d'un cheminement personnel, c'est une démarche religieuse, c'est un respect pour Dieu, donc j'en profite pour dire que ce n'est pas un signe de soumission, moi je suis issue d'une fratrie de quatre soeurs, donc je n'ai pas de frères, je n'ai jamais eu de discussion avec mon père autour du voile, il n'est pas intervenu dans ce choix (...) et donc quand j'entends des discours où on dit que la femme est soumise, je me demande à qui je suis soumise ?"

Le débat se recentre ensuite sur le principe global de laïcité, qui aurait, sondage à l'appui, selon l'un des journalistes présents, changé de définition pour les Français et qui correspondrait désormais à une pratique de la religion seulement et uniquement autorisée dans la sphère privée et donc pas dans l'espace public.

Différencier la loi des opinions personnelles

"Vous devez différencier la loi des opinions personnelles", lui répond la jeune femme. "La laïcité, comme vous le savez, repose sur trois principes et valeurs, à savoir la liberté de conscience, c'est-à-dire de pouvoir manifester ses convictions sans perturber l'ordre public, ce qui n'était je pense pas le cas au sein du Conseil Régional, vous avez également la séparation entre les institutions publiques et les organisations religieuses et enfin l'égalité de tous face à la loi quelque soient les convictions ou les croyances. Donc moi je me demande est-ce qu'on défend la laïcité, ou est-ce qu'on est en train de tomber dans le laïcisme puisque la laïcité n'est pas une nouvelle religion qui tend à effacer toutes les autres mais c'est l'art de vivre ensemble."

Le voile dans les quartiers

Jamais à court d'arguments, mais souvent très proches de l'amalgame, les invités tentent ensuite de faire céder Sara El Attar sur la vie dans les "quartiers" : "vous pouvez dire que dans les quartiers, il n'y aucune jeune fille qui subit les pressions de son père ou de ses frères ou des gens du quartier ? Ça n'existe pas ?" lui assène un invité. "Pas la majorité" répond Sara El Attar. "On a l'impression que vous voulez généraliser ce phénomène isolé et nous coller cette étiquette. (...) Quand on associe le port du foulard à l'inégalité homme/femme moi je me sens oppressée par la vision de certaines personnes misogynes et machistes qui veulent définir à ma place la notion de liberté".

Instrumentalisation de l'islam

Pas assez pour convaincre Elizabeth Levy, rédactrice en chef de Causeur, qui lui explique alors que "le voile heurte une certaine façon de vivre en France" et que souvent "le voile va de pair avec la détestation de la France". Encore une fois, Sara El Attar rappelle à la journaliste que ses opinions personnelles ne peuvent définir la loi. "La femme doit être libre de se vêtir comme elle le veut, d'un chapeau, d'un couvre-chef d'une mini-jupe ou d'un voile ou de ce qui lui chante, sans que qui que ce soit ne puisse lui imposer de faire autrement".

"L'islam ce n'est pas une paella dans lequel on doit regrouper le voile, le terrorisme, .etc., il faut bien distinguer les débats et ne pas faire d'amalgame. On ne représente même pas un quart de la population mais dès que vous allumez la télévision, on occupe les trois quarts du débat public. Ce n'est pas normal, c'est de l'acharnement médiatique", conclut la jeune femme. En conclusion, cette émission donne l'impression que les intellectuels sont à côté de la plaque et ne comprennent rien aux problèmes de communautarisme, de quelque communauté que ce soit.

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Mis en ligne : Mardi 29 Octobre 2019
 
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