La reine Zénobie ou Zineb

Septimia Bathzabbai ou Zénobie (240-274 après JC)
Septimia Bathzabbai ou Zénobie (240-274 après JC)

Zénobie est le nom latin de celle qui s'appelait Bath Zabbai en araméen. C'était une reine syrienne qui régna de 266 à 272 de notre ère et qui fit de son royaume, Palmyre, un centre de rayonnement culturel. Zénobie est tellement admirée au Moyen-Orient et au Maghreb, qu'aujourd'hui encore, on donne son prénom aux filles: Zineb, forme arabe de Zénobie. Nous allons vous raconter son histoire.

La naissance de Zénobie à Palmyre

Commençons par présenter Palmyre: cette ancienne ville autrefois verdoyante de Syrie se situait entre les fleuves du Tigre et de l'Euphrate, au Nord de Damas. Durant l'Antiquité, on l'appelait Tadmar ("ville des Palmiers"). Le Royaume de Palmyre a été fondé à la fin du troisième millénaire avant notre ère par des tribus araméennes. Palmyre fut dès ses débuts une citée araméenne prospère et devint, plus tard, une province romaine.

Zénobie est probablement née au milieu des années 200, d'un père syrien et citoyen romain et d'une mère égyptienne. Son père, Aurelius Zenobius (Zabaii ben Selim en arabe), était un chef de tribu issu d'une famille royale originaire de Homs (Emese), une ville ancienne sur la rivière Zab (l'Oronte). Zénobie reçut une solide éducation et apprit les langues les plus importantes de son époque: l'Araméen, le Grec, l'Egyptien et le Latin.

Son règne et ses victoires

En 258, le roi de Palmyre Adenan épouse Zénobie, qui devient alors princesse et assiste son époux dans la gouvernance du royaume, sans toutefois prendre directement part aux combats. Adenan (ou Adenath) est un roi charismatique et un vaillant guerrier. Il remporte plusieurs victoires militaires contre les Perses. Comme le royaume de Palmyre est sous tutelle romaine, ces victoires lui valent la reconnaissance de l'empereur romain de l'époque, Gallien, qui lui confie le commandement de l’Armée romaine d’Orient en 261.

Vers 266, Zénobie donne naissance à un fils qui reçoit, comme le veut la tradition bédouine, le prénom de son grand-père paternel Wahballath ("don de la déesse"). Au même moment, le roi Adenan projette peut-être de prendre ses distances vis-à-vis du Pouvoir romain. A cette époque en effet, les combats avec l'ennemi perse cessent. Une réconciliation entre les rois de Palmyre et de Perse a-t-elle eu lieu? Nul ne le sait! Mais si le général romain Aurélien eut vent de cette (possible) réconciliation, cela ne fut sûrement pas à son goût. N'oublions pas qu'Adenan est commandant en titre de l'Armée romaine d'Orient et que la Perse est une ennemie acharnée de Rome.

Une réconciliation entre Palmyre et la Perse serait considérée comme une trahison du roi de Palmyre envers Rome. Justement, ne voilà-t-il pas qu'Adenan est assassiné dans des circonstances mystérieuses! Très peu de temps après, c'est au tour de l'empereur Gallien d'être tué par... son général Aurélien, qui le trouvait trop bon, trop faible. Gallien le poète était surtout devenu gênant aux yeux d'Aurélien, qui briguait la haute fonction d'empereur.

Mais revenons à Palmyre. Comme l'héritier en titre Wahballath n'est encore qu'un bébé à la mort de son père, c'est à sa mère Zénobie que revient la mission de diriger le royaume de Palmyre. A partir de là, une formidable épopée commence! On dit de Zénobie que c'était une souveraine habile, avec une forte personnalité. Mais on omets parfois de dire qu'elle était belle selon les critères de son époque. De mémoire populaire, la reine avait des dents blanches et étincelantes comme des perles et des yeux noirs et brillants comme des miroirs. De plus, la reine Zénobie était cultivée et appréciait beaucoup les auteurs et philosophes grecs de l'Antiquité. Elle aurait mis un point d'honneur à les faire connaître aux savants de son royaume.

Pour honorer la mémoire de son époux, Zénobie s'efforça d'agrandir le royaume de Palmyre, comme il le souhaitait de son vivant. La reine Zénobie connaissait bien la langue et la culture égyptiennes antiques, c'est peut-être pour cette raison qu'elle choisira en premier de rallier l'Egypte à son royaume. Elle est proclamée reine d'Egypte vers 269-270 par le peuple, mais ce n'est qu'un titre honorifique: l'Egypte reste une province romaine. Contrairement à ce que prétendaient les chroniqueurs romains, rien ne prouve que la reine Zénobie ait conquis l'Egypte par la violence. Au contraire, la reine a su gagner la confiance de ses sujets, qui étaient las de la domination romaine et des pillages de leurs ressources agricoles, avec tact et respect. On dit qu'elle était une cavalière remarquable, certes, mais c'était aussi une femme diplomate et qui, de surcroît, avait la plus grande estime pour l'Egypte, d'où sa propre mère était originaire.

Temple de Bêl érigé par Zénobie pour le culte du dieu-bouc
Temple de Bêl érigé par Zénobie pour le culte du dieu-bouc

La reine Zénobie face au général Aurélien

Après avoir ourdi de nombreux complots d'assassinat contre des empereurs et des sénateurs romains gênants, avec l'aide de complices qu'il a finalement assassinés aussi, Aurélien voit son rêve se réaliser lorsque ses troupes l'acclament empereur en 270. Le Royaume de Palmyre quant à lui, voyant qu'on lui fait bon accueil dans les territoires qui s'étendent de la Syrie au Bosphore (environs de l'actuelle Istanbul en Turquie), alors sous autorité romaine, les prend en régence en l'an 271 sans les conquérir militairement. Cette audace ne passe pas inaperçue! Aurélien voit dans cette erreur stratégique de la reine Zénobie l'occasion idéale de "reconquérir" les territoires orientaux (qui, en fait, étaient restés sous l'égide de Rome) et d'asseoir sa légitimité en tant qu'empereur romain d'Orient. Il déploie ses troupes installées en Egypte et en Asie Mineure pour prendre Palmyre en étau. Les troupes romaines et palmyriennes s'affrontent, et comme on peut s'en douter, les troupes de Zénobie sont écrasées. Désespérée, la reine part demander de l'aide aux Perses mais elle n'arrivera jamais à bon port: elle est capturée en chemin par les soldats romains et emmenée à Rome avec son jeune fils de six ans.

Comme le veut la coutume, Aurélien organise en 274 une parade triomphale au cours de laquelle il fait défiler enchaînés sur des chars les souverains de nations étrangères qu'il a capturés. Zénobie fait partie des trophées de l'empereur. Après avoir été exhibée pieds et mains attachés comme une bête de foire, la reine déchue est laissée comme esclave dans un village de villégiature, pour servir des notables... elle meurt l'année même, sans que nous ne sachions comment. De même que nous perdons la trace de son fils Wahballath, héritier du Trône de Palmyre. L'empereur Aurélien quant à lui ne survécut pas longtemps à la reine Zénobie, puisqu'il mourut l'année suivante, assassiné par l'un de ses légionnaires...

La capture de la reine Zénobie, descendante de très anciennes tribus d'Araméens honorables, et la destruction de son royaume qui avait plus de trois mille ans, contribuèrent à rendre les Romains encore moins sympathiques en Orient. En effet, le Royaume de Palmyre était un lieu incontournable du commerce et un foyer culturel et spirituel très apprécié pour ses beaux portiques, ses établissements de bains et ses temples, comme le célèbre Temple de Bêl. Hélas, l'empereur Aurélien avait décidé de saccager le royaume, sans égards pour ce qu'il représentait pour les gens de l'époque. En réalité, la prise de la reine de Palmyre annonçait le futur déclin de l'empire romain.

Voilà donc l'histoire de cette belle reine qui régna jadis sur le Royaume de Palmyre et qui était aimée de ses sujets. Imaginez-vous: elle a marqué les esprits et l'Histoire alors qu'elle n'a régné que six ans! Bien qu'elle ait certainement eu des défauts, elle n'en demeure pas moins une femme d'exception qui méritait qu'on lui rende hommage.

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Mis en ligne : Dimanche 20 Janvier 2008
 
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