Norman Finkelstein est un juif antisioniste. Il n'est pas le seul, ils sont nombreux à condamner le projet sioniste de l'Etat d'Israël. Toute sa famille fut décimée par les nazis sauf ses parents qui s'en sont sortis physiquement indemnes, mais marqués à vie. M. Finkelstein n'a pas hésité à manifester dans les rues de New-York pour désavouer le projet sioniste et les violences faites à l'encontre des Palestiniens. Pour lui, les sionistes et les nazis partagent des points communs. Un témoignage qu'il faut garder à l’esprit quand une poignée d'individus en Europe, et en France en particulier, voudrait condamner toute critique de l'Etat hébreu et voudrait également associer antisémitisme et antisionisme. La preuve par l'avis même de M. Finkelstein que cela est d'une grande hypocrisie.
N'oublions pas que l'antisémitisme est un concept ridicule. Encore plus lorsqu'en France il est considéré comme un crime. En effet le terme Sémite viens de Sem, fils de Noé, l'un des grands patriarches bibliques. "Dieu bénit Noé et ses fils en leur disant: Multipliez-vous et peuplez toute la terre". Chaque humain sur terre est Sémite, fils de Sem. Personne ne peut donc être antisémite, du point de vue biblique. Il serait bon de renommer les choses correctement, de notre point de vue, l'antisémitisme est une aberration et nous devons éviter d'embrouiller les débats avec cette condamnation absurde.
Nous sommes contre l’idée de nous en prendre aux juifs, juste parce qu’ils sont juifs. Cela s’appelle du racisme et nous estimons que toute agression injustifiée envers les juifs parce qu’ils sont d’origine juive est une forme de xénophobie contre laquelle il faut lutter. Maintenant, il ne faut pas confondre les juifs avec l’Etat sioniste créé notamment par des gens qui méprisaient ouvertement les juifs, surtout lorsqu’il s’agissait de traditionalistes, de pratiquants vrais du judaïsme, de hassidim… Ces juifs qui veulent préserver leur culture et qui sont contre le métissage que les sionistes leur imposent!
Voici donc un extrait de l'interview de M. Norman Finkelstein accordée à info-palestine.eu en 2016.
Norman G. Finkelstein parle de Naz Shah membre du Parlement, de Ken Livingstone, et de la controverse sur l’"antisémitisme" au parti travailliste.
Norman G. Finkelstein est un écrivain. Il a écrit en 2000 L’industrie de l’Holocauste. Le livre, qui a été publié en feuilleton dans le Guardian, est devenu un best-seller international et a déclenché une tempête médiatique. Mais la dernière incursion politique de Finkelstein est le fruit du hasard. C’est arrivé lorsqu’une députée anglaise, Naz Shah, est devenue l’une des figures les plus médiatisées, à ce jour, dans le scandale de "l’antisémitisme" qui secoue toujours la direction du parti travailliste. Shah a été suspendue du parti travailliste pour, entre autres choses, avoir reposté une image sur Facebook qui a été considérée comme antisémite.
L’image montrait une carte des États-Unis avec Israël en surimpression, et suggérait de résoudre le conflit israélo-palestinien en relocalisant Israël aux États-Unis. On a dit que Shah avait pris l’image sur le site Web de Finkelstein. J’ai demandé à Finkelstein pourquoi il avait posté cette image, et ce qu’il pensait des allégations selon lesquelles le parti travailliste avait un "problème juif".
Avez-vous fabriqué l’image controversée que Naz Shah a reprise?
Je ne suis pas assez habile avec les ordinateurs pour fabriquer une image. Mais j’ai posté la carte sur mon site en 2014. Un de mes correspondants internet doit me l’avoir envoyée. Elle était, et est toujours, drôle. N’était le contexte politique actuel, personne n’aurait remarqué que Shah l’avait postée. Il faut complètement manquer d’humour. Ce genre de plaisanterie est monnaie courante aux Etats-Unis. Donc, voilà la blague en question: pourquoi Israël ne devient pas le 51ième Etat ? Réponse: parce qu’alors, il n’aurait que deux sénateurs. Aussi fou que soit le discours sur Israël en Amérique, nous avons encore le sens de l’humour. Ce serait inconcevable aux États-Unis, qu’un politicien soit crucifié pour avoir posté cette carte.
Le fait que Shah ait posté cette image a été présenté comme un soutien à l’ignoble politique de "déportation" tandis que John Mann l’a comparée à Eichmann
Franchement, je trouve cela grotesque. Je doute que tous ces gens qui sont si prompts à invoquer l’Holocauste aient la moindre idée de ce qu’étaient les déportations, ni des horreurs qu’elles signifiaient. Ma défunte mère m’a décrit sa déportation. Elle était dans le Ghetto de Varsovie. Les survivants du soulèvement du Ghetto, environ 30 000 Juifs, ont été déportés au camp de concentration de Maijdanek. Ils étaient entassés dans des wagons de chemin de fer. Ma mère était assise à côté d’une femme avec un enfant. Et la femme – je sais que cela va vous choquer – la femme a tué son bébé en l’étouffant, devant ma mère. Elle a préféré étouffer son enfant, plutôt que de l’emmener là où ils allaient. Voilà ce que cela signifiait d’être déportés. Tous ces apparatchiks desséchés du parti travailliste qui traînent dans la boue l’holocauste nazi dans leurs luttes mesquines de pouvoir pour avancer leur carrière, n’ont-ils pas honte?
Et quand les gens utilisent des analogies nazies pour critiquer les politiques de l’État d’Israël? N’est-ce pas là aussi un abus politique de l’holocauste nazi?
Il n’est pas facile de répondre à cette question. Tout d’abord, si vous êtes juif, l’analogie qui vous vient instinctivement à l’esprit, quand il s’agit de haine ou de famine, de guerre ou de génocide, c’est l’holocauste nazi, parce que nous le voyons comme l’horreur ultime. Dans la maison où j’ai grandi, chaque fois qu’on rapportait aux informations un incident de discrimination raciale ou de sectarisme, ma mère le comparait à ce qu’elle avait vécu avant ou pendant l’holocauste nazi.
Ma mère étudiait à la faculté de mathématiques de l’Université de Varsovie, en 1937-38. Les Juifs devaient s’installer à part des autres étudiants dans l’amphithéâtre, et les antisémites venaient les attaquer physiquement. (Vous vous rappelez peut-être la scène dans Julia, où Vanessa Redgrave perd sa jambe en essayant de défendre les Juifs attaqués à l’université.) Je me souviens d’avoir une fois demandé à ma mère: "Comment se sont passé tes études? As-tu réussi?" Elle m’a répondu: "De quoi tu parles? Comment pourrait-on étudier dans de telles conditions?".
Elle a vu, dans la ségrégation des Afro-Américains, que ce soit dans une cafétéria ou dans le système scolaire, le prologue de l’holocauste nazi. Alors que de nombreux Juifs disent maintenant: Il ne faut jamais comparer, (voyez le refrain d’Elie Wiesel, "c’est épouvantable, mais ce n’est pas l’Holocauste"), le credo de ma mère était: Il faut toujours comparer. Elle laissait naturellement et généreusement son imagination sauter le pas vers ceux qui souffraient, pour les envelopper et les embrasser dans sa propre souffrance.
Pour ma mère, l’holocauste nazi était un chapitre de la longue histoire des horreurs de la guerre. Il n’a pas été en lui-même une guerre – elle répétait que c’était une extermination, pas une guerre – mais c’était un chapitre unique de la guerre. Donc, pour elle, la guerre était l’horreur ultime. Quand elle a vu les Vietnamiens se faire bombarder pendant la guerre du Vietnam, pour elle c’était l’holocauste nazi. C’était les bombardements, la mort, l’horreur, la terreur, qu’elle avait elle-même traversés. Quand elle a vu les ventres distendus des enfants affamés au Biafra*, c’était également l’holocauste nazi, parce qu’elle se souvenait de sa propre famine dans le ghetto de Varsovie.
Parenthèse* : Le Biafra, en forme longue république du Biafra, est entre 1967 et 1970 un État sécessionniste situé dans la partie sud-est du Nigeria, et quoiqu’elle soit la plus riche en réserves de pétrole, les habitants du Biafra n’ont pas pensé à en exploiter les ressources alors que le pétrole est sans doute l'une des ressources les plus convoitées au monde au point d'être souvent le nerf de la guerre. C'est lui qui a permis l'émergence des économies industrielles au XXe siècle. C’est une bénédiction d’avoir sur son sol du pétrole.
Si vous êtes juif, c’est tout à fait normal que l’holocauste nazi soit un événement horrible omniprésent. Certains Juifs disent que telle ou telle autre horreur n’est pas l’holocauste nazi, d’autres disent qu’elle l’est. Mais la référence à l’holocauste nazi est une constante.
Que penser de ceux qui, sans être juifs, font l’analogie?
Une fois que l’holocauste nazi est devenu le référent culturel, si vous vouliez attirer l’attention sur la souffrance des Palestiniens, il fallait faire l’analogie avec les nazis parce que c’était la seule chose qui résonnait pour les Juifs. Si on avait comparé les Palestiniens aux Amérindiens, on ne nous aurait pas prêté attention. En 1982, quand je suis descendu dans les rues de New York avec une poignée d’autres Juifs pour protester contre l’invasion israélienne du Liban (au moins 18 000 Libanais et Palestiniens ont été tués, en grande majorité des civils), je tenais une pancarte disant: "Ce fils de survivants du soulèvement du ghetto de Varsovie, d’Auschwitz, de Maijdenek ne restera pas silencieux: Nazis israéliens – Mettez fin à l’Holocauste au Liban!" (Après la mort de ma mère, j’ai trouvé une photo de moi tenant ce panneau dans un tiroir parmi ses souvenirs). Je me souviens que l’un des gars qui manifestait avec moi ne cessait de me dire: "Tiens la pancarte plus haut!" pour que les voitures qui passaient le voient bien (et moi je lui répondais: "Facile à dire!").
Quand on faisait cette analogie, cela frappait les Juifs, cela les frappait assez pour obtenir leur attention tout du moins. Je ne pense pas que cela soit toujours nécessaire, parce que les crimes d’Israël contre les Palestiniens parlent maintenant d’eux-mêmes. Il n’y a plus besoin de les juxtaposer à, ou contre, l’holocauste nazi. Aujourd’hui, l’analogie nazie est gratuite ou sert à détourner l’attention.
Est-ce antisémite?
Non, c’est juste une faible analogie historique – mais, si elle est faite par un Juif, c’est une analogie morale et généreuse.
Ken Livingstone a pris le micro pour défendre Naz Shah, mais ce qu’il a dit a provoqué sa suspension du parti travailliste. Sa remarque la plus incendiaire a été qu’Hitler a, à un moment donné, soutenu le sionisme. Cela a été condamné comme antisémite, et le député travailliste John Mann a accusé Livingstone d’être un "apologiste du nazisme". Que pensez-vous de ces accusations?
Livingstone n’a sans doute pas été assez précis et nuancé. Mais il connait bien ce chapitre sombre de l’histoire. Il y a eu des spéculations sur le fait qu’Hitler avait changé d’idée sur la façon de résoudre la "question juive" (comme on l’appelait à l’époque), en voyant surgir de nouvelles possibilités. Hitler n’était pas entièrement hostile au projet sioniste au début. C’est pourquoi tant de Juifs allemands ont réussi à survivre après l’arrivée d’Hitler au pouvoir en émigrant en Palestine. Mais, ensuite, Hitler en est venu à craindre qu’un Etat juif renforce le pouvoir de la "juiverie internationale", alors il a cessé toute relation avec les sionistes. Plus tard, Hitler a peut-être envisagé une "solution territoriale" pour les Juifs. Les nazis ont envisagé de nombreuses possibilités de "réinstallation" – les Juifs n’auraient pas survécu à la plupart d’entre elles sur le long terme – avant de s’embarquer dans un processus d’extermination pure et simple. Ce qu’a dit Livingstone est à peu près exact – au moins aussi exact qu’on peut l’attendre d’un politicien qui s’exprime de manière impromptue.
Il est aussi exact qu’un certain degré d’affinité idéologique existait entre les nazis et les sionistes. Les antisémites et les sionistes étaient d’accord sur une question cruciale qui agitait l’Angleterre pendant la période où la Déclaration Balfour (1917) était bricolée: un Juif pouvait-il être Anglais? Ironie du sort, quand on voit l’hystérie qui règne actuellement au Royaume-Uni, les adversaires les plus véhéments de la Déclaration Balfour n’étaient pas les Arabes, dont tout le monde se fichait bien, mais les plus hautes sphères de la communauté juive britannique.