Les récents événements en Algérie montrent qu'il existe une frange importante de commentateurs politiques et de médias qui sont dans le déni. Ils se contentent d'une rengaine consistant à critiquer le gouvernement algérien pour tout événement négatif survenant dans le pays. Cela a pour effet d'empêcher le peuple algérien d'avoir des informations éclairées, de comprendre des situations complexes: au mieux, les médias se contentent de relayer des faits que l'on a déjà lus à dix autres endroits, de répéter sans plus-value ni contrôle des informations émanant de l'agence de presse - au style si télégraphique et insupportable -, au pire ils se ruent sur une critique sans retenue des responsables politiques algériens.
Les menaces extérieures
Mais ce serait oublier que des forces oeuvrent sans cesse, et dans chaque pays, à prendre le contrôle, à user la population, à la dégoûter de la situation actuelle. L'Algérie n'en est pas exempte, loin de là. Regardez la situation des autres pays arabes; l'Algérie est le seul pays arabe non aligné sur l'Occident, qui reste debout. C'est donc des forces importantes qui sont à l’œuvre pour faire plier l'Algérie, et on pourra reprocher ce que l'on veut au pouvoir algérien, les responsables algériens doivent composer avec cela, et eux sont bien conscients de la menace.
Rappelez-vous ce que professait Tzu Sun dans l'Art de la guerre: "Vous profiterez de la dissension qui surgit chez vos ennemis pour attirer les mécontents dans votre parti en ne leur ménageant ni les promesses, ni les dons, ni les récompenses. Entretenez des liaisons secrètes avec ce qu'il y a de plus vicieux chez les ennemis ; servez-vous-en pour aller à vos fins, en leur joignant d'autres vicieux.". C'est exactement ce qui se passe en Algérie, il faut faire preuve de lucidité.
Ce qui devrait faire réagir les Algériens, c'est le poids grandissant, les soutiens importants, et l'utilisation sans cesse grandissante dans l'espace médiatique des informations du MAK-Anavad et de son représentant, M. Mehenni.
Par exemple, récemment, il a eu droit à une tribune dans la revue le360.ma. Un média d'Etat marocain qui s’autoproclame indépendant, une vaste plaisanterie, le monde entier sait que ce média est piloté directement par le pouvoir marocain, appelé le Makhzen. Donc lorsque le360.ma accorde une tribune au MAK-Anavad, il faut y voir un appui des dirigeants marocains. Il est drôle d'ailleurs que le MAK-Anavad, qui se veut un défenseur de la démocratie, de la liberté et de droits humains n'hésite pas à s'exprimer dans ce média. Ce média qui, lui, cautionne au quotidien la propagande du Makhzen, qui trouve justifié l'enfermement des voix dissidentes marocaines et l'emprisonnement des opposants politiques. M. Mehenni fait preuve, comme à son habitude, d'une dissonance cognitive idéologique certaine. Dans sa tribune, Mehenni rabâche sa thèse hallucinante et paranoïaque sur l’ethnocide de la population kabyle puis explique : "Nous voudrions même qu’au lieu d’être un point d’achoppement entre les grandes puissances qui se disputent des hégémonies, des aires hégémoniques à travers le monde… nous soyons non pas un point d’achoppement mais un trait d’union entre tous". Il avoue ainsi que son "mouvement" séparatiste est à l’œuvre pour le compte de grandes puissances. Quelles puissances? Celles qui le soutiennent publiquement pour commencer: le Maroc, Israël et la France.
Pas étonnant donc que les dirigeants algériens aient classé le MAK-Anavad comme étant un mouvement terroriste. Ce mouvement qui n'emporte pas l'adhésion des Kabyles est toutefois très efficace pour imposer une chape de plomb dans les esprits, laissant instaurer un discours de haine et de sédition à l'égard des autres Algériens et réprimant tout Kabyle qui souhaite s'exprimer dans la sphère publique. La même loi du silence et de pression qui s'applique lorsque sont organisées dans le pays des élections. Et si un village a trop de rebelles à la "cause", alors on détruira les bureaux de votes, ainsi ils n'iront pas voter... En attendant, le MAK-Anavad c'est une fédération de tout au plus 1600 noms la grande majorité vivant à l'étranger. Les Algériens de Kabylie ne devraient plus subir le discours d'une poignée d'individus.
Ce qui est également très grave, c'est le parti-pris de nombreux médias algériens, qui préfèrent soutenir des avis ou des initiatives prises par le Maroc ou la France, de plus en plus indulgents vis-à-vis d'Israël, mais toujours très critiques à l'encontre du gouvernement algérien. Qu'ils doivent se sentir bien seuls les dirigeants algériens, entre un peuple aveugle et endormi, des médias hostiles et des agressions étrangères permanentes.
Quels sont les torts de l'Algérie ?
Etre fidèle à ses principes. Combattre la colonisation, et militer pour que des peuples opprimés puissent retrouver leur liberté, leur indépendance, leur autonomie.
Est-ce que les Kabyles sont opprimés ou colonisés? Non bien sûr, puisque les Algériens kabyles ne sont pas opprimés. Les régions kabyles font partie de l’Algérie depuis toujours et les Algériens kabyles se sont battus pour que l'Algérie soit indépendante! Des ministres d'origine kabyle ne manquent pas. Les Kabyles sont des Algériens avant tout mais c'est exactement sur ces principes typiques de l'Algérie qu'essayent de surfer les Mehenni et autres pour le bien de leurs petites affaires. Ces militants séparatistes sont les seules nuisances envers les Algériens kabyles.
Est-ce le cas des Sahraouis et des Palestiniens? Bien sûr! Il n'est pas possible de se dire défenseur de la cause de ces deux peuples et condamner l'Algérie car les rares prises de position de l'Etat algérien, et les prises de risques qui en ont découlé, ne sont que des actes militants pour ces deux peuples. L'Algérie ne tire aucune gloire ni aucun profit de ces prises de positions. Est-ce qu'on peut en dire autant des camps d'en face? En bref, l'Algérie serait bien moins troublée si elle renonçait à défendre les Sahraouis et les Palestiniens, mais dans le même temps, elle perdrait son âme et se renierait... Est-ce souhaitable? En tant qu’Algérien, peut-on vivre avec cette idée?
Le gouvernement algérien doit donc composer avec des attaques externes incessantes et un soutien médiatique et populaire quasi nul. Récemment, les dirigeants ont annoncé que les gigantesques feux de forêt qui ont ravagé le nord du pays étaient d'origine criminelle. Mais les médias du monde entier n'étaient pas satisfait de cette affirmation car cela allait à l'encontre d'un récit bien pratique affirmant que la planète brûle à cause du réchauffement climatique. Pourtant, en Juillet, il y a déjà eu des incendies criminels dans les Aurès et les responsables, de jeunes gens, ont avoué les faits. Dans les années précédentes, les nombreux feux ont révélé leur nature criminelle également; il y a donc des précédents. De plus, une dizaine de jeunes qui ont été arrêtés suite aux récents incendies, ont eux aussi avoué. L'enquête n'a pas tout livré mais des fuites indiquent une implication indirecte du pouvoir marocain; en quoi serait-ce impossible au vu de la situation géopolitique? Vous doutez? Très bien, mais pourquoi se convaincre plus facilement de la piste de feux spontanés dus au réchauffement climatique? Il y a pourtant moins de preuves pour corroborer cette piste, puisqu'il n’y en a aucune officiellement à ce jour. Des jeunes en prison ayant avoué avoir mis le feu, par contre, il y en a une dizaine... L'un d'entre eux a même été appréhendé alors qu'il cherchait à rejoindre la frontière marocaine, d'autres pyromanes ont avoué faire partie du MAK-Anavad.
D'ailleurs, le Maroc sait utiliser les jeunes dans ses stratégies politiques. Récemment, pour protester contre l'Union Européenne d'avoir boycotté sa présence à la table de négociations au sujet de la Libye et d'avoir soigné le chef des indépendantistes sahraouis du Front Polisario, le Makhzen n'a pas hésité à envoyer plusieurs milliers de jeunes mineurs en Espagne afin de créer une crise migratoire. Personne n'a été dupe de la manigance. La encore, il y a un précédent pour étayer la possibilité de l'implication du Maroc dans les récents événements en Algérie. Il est donc important de considérer les explications qui s'appuient sur des faits, des précédents et une probabilité au vu du contexte, plutôt que d'hypothèses reprises par le plus grand nombre mais qui s'appuient sur du vent.