Ils choisissent d'avoir un animal de compagnie plutôt que des enfants
Alors même que le taux de fécondité mondial, c’est-à-dire l’estimation du nombre d’enfants que chaque femme aura dans sa vie, baisse continuellement depuis les années 1960, passant de 5,3 enfants par femme à 2,3, de plus en plus de couples préfèrent s’abstenir de mettre des enfants au monde pour "préserver le climat", arguent-ils. Voici des témoignages de couples expatriés à Dubaï, qui ont fait le choix de ne pas avoir d'enfants et de les remplacer par des animaux.
"Je n’aurais jamais cru que l’empreinte de mon chien serait gravée dans mon cœur jusqu'à ce que je rencontre Zeus", dit celle que nous appellerons Leila et qui souhaite garder l’anonymat. Et d’expliquer que "Le petit Westie n’a pas tardé à entrer dans ma vie et à en prendre le contrôle ! J'éteins les lumières quand il est temps pour lui de dormir, je me réveille à chaque fois qu'il tousse et je suis nerveuse lorsque la nourriture que je lui donne ne lui plait pas. Je suis une maman-chien. Quand je regarde autour de moi, je réalise que je ne suis pas la seule à traiter mon chien comme un enfant. J’ai l’impression que les chiens ont apporté un peu de bien-être poilu à de nombreuses vies. Comme moi, Charlotte Louisa Leake est une mère paranoïaque !". Et celle-ci de dire : "Je n'ai pas pris de vacances pendant cinq ans parce que j'étais très anxieuse et très inquiète à l'idée que les gens s'occupent de mes animaux, car ce sont mes enfants et je m'inquiète pour eux comme je m'inquiéterais pour un enfant. Je pense que si je me suis enfin décidée à prendre quelques jours de vacances, c'est parce que mon frère est venu s’installer aux Émirats arabes unis il y a un an et qu'il est venu s'occuper d'eux en mon absence", explique l'expatriée britannique âgée de 37 ans, qui a lancé récemment "Where My Paws At" (Où sont mes pattes), une application de sécurité pour animaux de compagnie.
On savait que les façons de faire des rencontres amoureuses avaient changé depuis l’avènement d’Internet. Désormais, c’est la vision de la parentalité qui est en plein changement. De plus en plus de personnes choisissent de faire profiter des animaux de leur instinct nourricier plutôt qu’un enfant. Pour certains, c'est un choix non réfléchi, alors que d'autres ont pesé le pour et le contre : quoi qu’il en soit, ils ne savent pas, aujourd’hui, ce qu'ils feraient sans leurs compagnons à quatre pattes.
Des animaux de compagnie pour progéniture
Leake explique pourquoi elle a choisi de renoncer à la maternité. "Il y a eu une étape dans ma vie, lorsque nous nous sommes mariés et que j’ai essayé de tomber enceinte. Au bout d’un an, je n’étais toujours pas enceinte. Mais je ne voulais pas vraiment chercher à comprendre pourquoi je n’y arrivais pas. Depuis, nous n’essayons plus activement d’avoir des enfants, et si cela devait arriver, tant mieux. A l’époque, j'avais déjà mes deux chiens et mes deux chats, donc mes besoins maternels étaient comblés. Et puis le coût de la vie augmente. Il y a tellement de bouleversements dans le monde d’aujourd’hui que je me dis : "Est-ce que je veux vraiment mettre au monde un être de plus, alors qu'il se passe tant de choses ?"."
Cette inquiétude perpétuelle face à l’état du monde et à ses ressources limitées pousse de plus en plus de couples à prendre des décisions qui jusqu’à présent étaient mal vues, mais qui semblent désormais légitimes. Prenons l’exemple d’Aditi et Mayank Bhargava, qui ont décidé sciemment de ne pas avoir d’enfants. Au début, Aditi voulait un bébé avec son mari, mais alors qu'elle se préparait mentalement, physiquement et émotionnellement à la grossesse, elle a réalisé qu'elle ne pouvait pas prendre la décision d’avoir un enfant aussi facilement. "Nous ne sommes pas à une époque où l'on peut prendre les choses à la légère – parce que les ressources s'épuisent, nous sommes confrontés à une pression économique et écologique, et au cours de notre vie, nous arriverons à un point où la nourriture, l'eau et l'air pur manqueront. Ainsi, dans nos esprits et dans nos conversations, beaucoup de ces points ont été discutés… et tous les aspects, négatifs comme positifs, ont été explorés.".
Les conversations franches qu’ils ont eues sont importantes, à leurs yeux. Aditi en a conclu que même si l’idée d’être enceinte ne lui déplaisait pas, elle n’était pas si enthousiaste que ça à l’idée de devenir parent. Par une heureuse coïncidence, elle et son mari ont décidé d’acquérir un chien. Ils avaient tous deux un chien lorsqu’ils étaient jeunes et en voulait un, maintenant qu’ils vivaient en couple. "Quand Nala est entrée dans la maison, il nous a semblé évident que nous avions fait le bon choix", dit-elle.
Faisant allusion à la pression sociétale immense exercée sur les gens quant à la manière dont ils doivent mener leur vie personnelle, elle estime que nous sommes conditionnés par les autres. On pense que si une femme a l’instinct maternel, elle fera une bonne mère et devrait donc avoir des enfants. "Mais j’ai lu quelque part que l’instinct maternel ne se limitait pas aux enfants. Vous êtes maternelle parce que vous prenez soin des gens qui vous entourent. Vous arrivez à un point où vous voulez vous développer en tant qu'être humain en prenant soin d'une autre vie, mais cette vie ne doit pas nécessairement être humaine. Je suis parfaitement heureuse d'être une mère de chien", dit-elle en riant.
Faire le choix de ne pas avoir d'enfant et adopter un chien
Le couple égyptien Reem Elkadi et Zee Elzayat vivent aux Émirats arabes unis depuis trois ans et ont emmené avec eux leur chienne, nommée Laika. Reem dit qu'elle a toujours reporté le fait d'avoir des enfants pour une raison ou une autre. Mais deux ans après son mariage – elle avait déjà un chien à ce moment-là – elle a dû se rendre à l’évidence.
"J'ai réalisé que je ne voulais pas avoir d'enfants et que je voulais juste garder des chiens… Elle [Laika] remplit nos vies – je ne connais personne qui nous aime comme elle ; elle nous aime plus que nous ne nous aimons. Elle nous aime d’une façon inconditionnelle. Nous avons décidé d'avoir des enfants de Laika. Alors Laika a été gestante, elle a eu huit bébés, nous en avons donné cinq et en avons gardé trois. Cela été très difficile de les abandonner. Laika en a choisi un, j'en ai choisi un et mon mari en a choisi un. Cela me semblait bien ainsi.".
Aujourd'hui, Reem est la fière parente et grand-mère, dit-elle, de quatre golden retrievers : Laika, Sina, Sultan et Gameela. Même si elle ne veut pas avoir d'enfants, elle dit que si elle et son mari décidaient un jour de fonder leur propre famille, ils adopteraient des enfants. "Il vaut mieux adopter que mettre notre propre enfant au monde… (Il n’est pas nécessaire d’être lié par le sang pour aimer quelqu’un).".
Pour certains, le choix des bébés à fourrure vient un beau jour d’épiphanie, c’est quelque chose qui survient de manière inattendue et accapare leur vie.
Lorsque Hannah Warman, une expatriée britannique de 28 ans, est arrivée à Dubaï, elle trouvait qu'avoir un chien était absurde. "On s'est dit : on n'aura jamais de chien à Dubaï ; ce n'est pas bien de le mettre dans un petit appartement avec une seule chambre. Et puis, nous avons gardé le chien d'un de nos amis alors qu'il était en voyage", dit-elle penaude. "Quand nous avons dû rendre le chien à son propriétaire, honnêtement, cela nous a brisé le cœur. Et cela nous a en quelque sorte montré que nous pouvions nous attacher à un chien. Et je pense qu'il y a tellement de chiens et de chats aux Émirats arabes unis qui ont besoin d'un foyer aimant ; c’est exactement ce dont nous avions besoin à ce moment-là de notre vie.".
Pour beaucoup, avoir des enfants n’est pas seulement un choix basé sur les émotions. Cela impacte aussi leur style de vie. "Elle [leur chien Stella] est en adéquation totale avec notre style de vie – nous avons un mode de vie très actif ; nous sommes dans les dunes du désert, explorons les montagnes et faisons des randonnées. Avoir un chien, cela correspond à notre style de vie, alors que faire ce genre d'activités n'est pas vraiment possible avec un bébé", dit-elle.
Les joies d'être une maman d'animaux de compagnie
L'expatriée britannique Kate Meagh n'a pas encore pris de décision ferme concernant les bébés, mais elle a certainement découvert les joies d'être une maman d'animaux de compagnie l’an dernier. "Elle [sa chienne Molly] est traitée comme une enfant, alors le jour de Noël, elle aura son propre bas et ses cadeaux emballés, même si elle n'a pas la moindre idée de quel jour nous sommes. Lorsque nous sortons dîner, elle a droit à son propre dîner avec un chien ; elle prend une glace si nous nous autorisons une petite friandise. Et nous nous appelons maman et papa, mon mari et moi. Je pense qu'elle se voit elle-même comme humaine et qu'elle est traitée comme une princesse.".
De son côté, Abigail Smith, 25 ans, qui a décidé d'emmener son chien Lotus au Royaume-Uni pendant six semaines l'été prochain, explique : "Mon partenaire l'emmène prendre son petit-déjeuner tous les matins dans les cafés acceptant les chiens. Parfois, il l'emmène à la plage. Nous l'emmenons en promenade, nous l'emmenons partout où les chiens sont autorisés. Nous socialisons beaucoup avec notre petit chien".
Un chien ne peut pas être un enfant
Nous trouvons cette tendance à remplacer des enfants par des chiens étrange ; après tout, le chien n’est-il pas un loup domestiqué ? Canis lupus familiaris compte dans ses rangs, outre les loups, les coyotes, les chacals et les renards. Le chien est une espèce carnivore qui garde un côté sauvage ! Cet animal, contrairement à un enfant, ne parle pas, il aboie. Et étant donné l’importance de la communication pour l’homme, il paraît difficile de faire la conversation à son animal de compagnie comme on le ferait à un enfant sans passer pour quelqu’un qui a un grain. Le chien préfère vivre à l’extérieur, où il peut courir, se nourrir de déchets alimentaires dans les poubelles des hommes, faire ses besoins et s’ébrouer : c’est assez limité comme activité. Et comment transmettre un héritage culturel ou religieux à un chien ? Non, soyons sérieux, adopter un chien, si gentil soit-il, ne sera jamais l’équivalent d’avoir un enfant, un vrai !
Avoir un enfant est-il mauvais pour la planète ?
Non. Plutôt que le nombre de gens, ce sont les modes de vie qu’il faut changer ! Pour Bénédicte Gastineau, chercheuse scientifique en démographie, il existe "une idée-reçue simpliste selon laquelle si on était moins nombreux sur Terre, on consommerait moins de ressources, [...] mais ce qu’on voit c’est que ce n’est pas tant le nombre d’êtres humains qui compte, mais bien les modes de production et de consommation.". D’après Mme Gastineau, "même en rayant l’Afrique de la carte, et même si les 214 millions de Brésiliens se mettaient à adopter le mode de vie des Américains du Nord, cela n’influerait pas sur le problème du réchauffement climatique.".
Nous devons donc changer nos modes de vie, moins polluer les mers (en évitant d'y déverser des produits chimiques ou toxiques), acheter local, avoir un potager, favoriser la consommation de pois chiches et de blé (riches en protéines) si on ne peut pas s'offrir de la viande (qui va devenir un mets de luxe à l'avenir), cuisiner des aliments naturels, être ingénieux, mieux recycler, .etc.. Et dans certains pays, il est possible de choisir un opérateur d'électricité plus écologique.
Il existe en réalité des solutions qui permettraient d'économiser les ressources terrestres intelligemment sans aller jusqu'à vouloir l’extinction de l’espèce humaine qui existe depuis 300 000 ans. Parce que si chaque couple se met à adopter un chien, c’est bien ce que nous risquons : de voir disparaître notre espèce plus vite qu’on ne l’imagine ; ce scénario n’est effectivement pas exclu par les scientifiques, qui estiment que la population humaine déclinera vers 2100 et qu’elle risque carrément l’extinction ! Sachez que certains militants prônent l'extinction volontaire de l'humanité.
N'oublions pas toutefois, que les personnes les plus riches et les plus influentes du monde, celles qui véhiculent justement l'idée d'un risque de surpopulation de la planète, ont elles, des familles nombreuses.