L'ex-mari marocain de Souad Massi condamné à 15 ans de réclusion

Souad Massi
Souad Massi

Il avait commis "l'impensable", selon l'accusation: l'ex-mari de la chanteuse Souad Massi a été condamné samedi à 15 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises des Bouches-du-Rhône (France), pour avoir tenté d'assassiner leurs deux filles en 2017.

"Les enfants étaient l'objet de sa vengeance": l'avocate générale Régine Roux avait requis au moins 20 ans de réclusion contre Mohammed Abdel (dit "Abdellatif Z."), qui a été aussitôt incarcéré samedi 4 mars 2023 au soir, lui qui n'avait fait que huit mois de détention provisoire après les faits.

"C'est terrible", a réagi son avocat, Me Jean Boudot, auprès de l'AFP. "On va faire appel, et ça nous désole aussi pour (les filles du couple), on aurait pu avoir une décision qui nous permette de clore cette affaire, mais on ne peut pas accepter une telle décision qui passe à côté de l'homme qu'il est".

Tout avait commencé par une histoire d'amour!

Depuis mercredi, témoins et experts s'étaient succédé à Aix-en-Provence pour revenir sur la rencontre d'Abdellatif Z. et Souad Massi, une cousine éloignée de sa première épouse, avec qui il avait eu trois autres enfants. Ils ont retracé leurs années de mariage, la naissance de leurs filles en 2005 et 2010, la carrière de la chanteuse qui décolle, leur vie de couple qui peu à peu s'étiole. Et pourtant, selon Souad Massi elle-même, la relation entre l’Algéroise et le Marocain avait commencé par une histoire d’amour passionnelle!

A l'été 2016, quelques mois après la révélation d'une ancienne relation adultérine de son mari, Souad Massi lui annonce qu'elle veut divorcer. S'ensuit une longue "descente aux enfers", selon les mots d'Elsa Loizzo, l'autre avocate d'Abdellatif Z., 64 ans, qui sombre dans une profonde dépression aux effets décuplés par des phases d'alcoolisation massive. "On est dans la maladie, pas dans le trait de caractère", a renchéri Me Boudot: "L'impensable, c'est impensable pour lui aussi".

Le 22 mars 2017, c'est l'intervention des secours in extremis, prévenus par Souad Massi, qui était alors en déplacement, qui avaient permis de sauver les deux filles du couple, alors âgées de 6 et 11 ans.

Leur père, retrouvé inconscient comme elles dans leur maison de Bouc-Bel-Air, entre Aix-en-Provence et Marseille, leur avait fait ingérer des médicaments puis avait ouvert une bouteille de gaz dans la chambre où elles se trouvaient, avant de répandre dans le domicile 40 litres d'un combustible qui n'avait pas pris feu, heureusement !

"La tristesse du drame"

"C'est un miracle", a plaidé pour les parties civiles Me Olinka Malaterre. "Et c'est pour ça que la tentative est punie comme l'assassinat, parce qu'un miracle n'arrive pas tous les jours".
C'est un appel d'Abdellatif Z. lui-même, vers 22h00, qui avait alerté Souad Massi. L'accusé lui promet alors qu'elle va "comprendre le sens du mot souffrir". Mais l'avocate générale a refusé de voir dans ce coup de fil un appel à l'aide: "Le seul appel salvateur", c'est celui de Souad Massi aux secours, a lancé la magistrate.

Et pourtant, a rappelé Me Boudot en défense, des experts eux-mêmes ont souligné "l'ambivalence" de cet appel, peut-être un appel au secours déguisé, voire inconscient.

"C'est l'histoire d'un homme qui souffre, personne ne le remet en cause", a reconnu Romain Verzeni, lui aussi pour les parties civiles, Souad Massi et ses filles. "Mais ce qu'on remet en cause, c'est que cette souffrance, il la met au-dessus de la vie de ses filles", a poursuivi dans sa plaidoirie Me Verzeni, évoquant "le paroxysme de la violence conjugale".

"Il souffre, il est perdu", a répondu Elsa Loizzo pour la défense, mentionnant l'annonce "traumatique" pour Abdellatif Z. de la volonté de Souad Massi de divorcer, à l'été 2016. Un épisode suivi d'une première tentative de suicide.

"Sa souffrance va finir par le briser et l'engloutir et le conduire à l'impensable", a plaidé Me Loizzo, au nom d'un accusé qui dès l'ouverture de ce procès mercredi avait reconnu les faits. "On vous propose la noirceur du crime de l'autre côté de la barre, moi je préfère la tristesse du drame", avait conclu Me Boudot. Comme requis par l'avocate générale, les jurés ont aussi retiré à Abdellatif Z. l'autorité parentale et ont retenu l'altération de son discernement au moment des faits, une circonstance qui lui faisait encourir 30 ans de réclusion criminelle au maximum, contre la perpétuité si la circonstance atténuante n'avait pas été retenue.

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Mis en ligne : Dimanche 5 Mars 2023
 
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